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Mylène Farmer - Interview - TV Magazine - 23 novembre 2012



  • Date
    23 novembre 2012
  • Média / Presse
    TV Magazine
  • Interview par
    Walter Choubert
  • Fichiers
      Mylène Farmer Presse TV Magazine 23 novembre 2012  Mylène Farmer Presse TV Magazine 23 novembre 2012  Mylène Farmer Presse TV Magazine 23 novembre 2012  Mylène Farmer Presse TV Magazine 23 novembre 2012   Mylène Farmer Presse TV Magazine 23 novembre 2012
  • Catégories interviews



TV Magazine : Votre dernier album remonte à deux ans. Vous nous aviez habitués à des intervalles plus longs...
Mylène Farmer : Oui. Je ne m'en rends pas compte. Deux ans dans un monde chronophage, où chaque jour engloutit le temps, cela paraît une éternité. Il s'agit probablement d'un manque et de l'envie de remonter sur scène.


Monkey Me marque la reformation de votre tandem artistique avec Laurent Boutonnat. Qu'est-ce que votre "infidélité" vous a apporté ?
Il ne s'agit pas d'infidélité ! Mon précédent album, Bleu Noir, n'était autre que le fruit de rencontres avec Moby, Archive et RedOne. Ils m'ont proposé des chansons qui ont provoqué mon désir et l'envie d'écrire... C'est aussi simple que ça. En outre, Laurent Boutonnat travaillait de son côté sur d'autres projets.


On vous connaissait rousse et vous vous montrez blonde platine sur l'album et les affiches de votre tournée. Que s'est-il passé ?
Moi aussi, je me connaissais rousse ! (Rires.) Mais sous le roux se cachent d'autres couleurs. Ne sommes-nous pas tous constitués de mille facettes ? Celle-ci avait envie de vivre...


Quel look allez-vous adopter pour votre tournée ? Et quelles surprises avez-vous concoctées pour ces concerts ?
Je ne peux y répondre maintenant. Mais, puisque vous l'évoquez, le mot surprise sera bien au rendez-vous.


Une nouvelle fois, vous avez battu le record de réservations en un minimum de temps. Cela vous touche-t-il encore ?
Je suis bouleversée à chaque fois ! Tellement bouleversée... Et, quelques instants plus tard, totalement affolée ! Il est impensable d'être blasée par un geste d'amour comme celui-ci. C'est un véritable cadeau et une responsabilité aussi. On ne veut pas décevoir ni se décevoir. On a donc un an pour se préparer à embrasser le regard de tous ceux qui ont la générosité d'attendre.


Quels conseils donneriez-vous à ceux qui écoutent vos chansons pour garder de l'espoir dans un monde aussi dur ?
Le monde a toujours été dur. Sous certains aspects, il l'est peut-être moins aujourd'hui, même s'il est autrement cruel. Moins solidaire, plus solitaire aussi. Je ne peux que penser à ceux qui sont bien plus malheureux, dans le besoin ou cloués sur un lit d'hôpital, et me dire qu'il faut affronter la vie et trouver des pépites dans des moments simples, ces moments qui sont souvent à portée de soi, mais qu'on ne voit plus. Être aimé de quelqu'un ou d'un plus grand nombre reste l'essentiel de la vie. Se préoccuper d'autrui rend meilleur


On vous dit solitaire. Pouvez-vous nous décrire une de vos journées quand vous ne travaillez pas ?
Vous voulez dire quand je ne travaille pas comme une personne qui doit se rendre quotidiennement à son bureau ? (Sourire.) C'est un grand privilège de n'avoir pas le sentiment de travailler, même lorsque je finis une séance de studio à 2 heures du matin ou lorsque je sors de scène exsangue. C'est du travail, mais je ne le vis pas comme un poids ni comme une obligation. C'est un choix et une immense chance. Je dois certainement partager ce sentiment avec toutes les personnes passionnées par ce qu'elles font. Mais je suis, c'est vrai, d'une nature solitaire. J'ai besoin de m'occuper de mes animaux, de dessiner, de nager, de regarder des films et je retrouve mes amis avec d'autant plus de plaisir...


Quels sont les journaux et les émissions de télévision que vous suivez régulièrement ?
Je ne regarde pas beaucoup la télévision finalement, surtout en période de travail. Mais j'ai toujours aimé les débats, quand les points de vue sont exprimés avec respect. La télévision est un média parfois trop pressé pour traiter le fond des choses. Je n'aime pas le cynisme systématique et la télévision bruyante. Il m'arrive de dévorer des séries comme Downton Abbey, Dexter ou Les Tudors et je regarde toujours avec autant de bonheur Un jour, un destin. Dans le fond, je ne recherche pas l'information à tout prix... Je la laisse me cueillir au détour d'un article, d'un reportage.


L'industrie musicale souffre et les ventes de CD ne cessent de baisser. Imaginez-vous un jour ne plus pouvoir sortir de disques ?
Chaque époque a connu la disparition d'un support. Il y aura toujours des disques physiques, même si le digital annonce une ère nouvelle. En tout cas, il y aura toujours un rapport affectif à l'objet quel qu'il soit. Les albums ou une autre forme restant à inventer rencontreront toujours un public. La musique existait dès la naissance de l'humanité.


Que pensez-vous des télé-crochets ? Est-ce un miroir aux alouettes, un mal nécessaire ou le seul moyen aujourd'hui d'être découvert ?
Je ne peux pas juger cette génération d'émissions puisque je ne les connais pas bien. Mais je suis toujours un peu gênée quand l'art devient un concours.


Le Québec, où vous êtes née, est en proie à de violents mouvements protestataires. Avez-vous conservé des attaches là-bas ?
La violence m'a surprise dans ce pays, à la réputation modérée. Je n'y ai conservé malheureusement aucune attache... Si ce n'est l'envie d'y retourner pour ses paysages de neige et peut-être transporter le prochain spectacle là-bas...


Quels artistes récents vous semblent dignes d'intérêt ?
Je suis impressionnée par Muse. Et par Matthew Bellamy, qui est aussi fascinant que Freddie Mercury !


Que pensez-vous des réseaux sociaux et des sites si nombreux qui vous sont consacrés ?
Je suis fascinée par la vitesse de l'information et la possibilité pour de nombreuses personnes de partager instantanément des sujets communs. Je pense aussi à ceux qui n'y ont pas accès. Avec qui partagent-ils leurs passions ? Aussi, je ne m'attarde pas sur les sites qui me sont consacrés. J'aurais l'impression d'entrer, sans y avoir été invitée, dans une pièce où les gens parlent de moi.


Une photo vous montre avec un gibbon. Est-ce celui que vous avez adopté il y a plusieurs années ?
Non. E.T. était un singe capucin, plus menu. Elle a partagé ma vie pendant plus de vingt-cinq ans. Il s'agit ici de Betty, une demoiselle de 4 ans, qui a été volée lorsqu'elle avait 3 mois et retrouvée huit mois plus tard. J'ai croisé son chemin grâce à Vincent Lindon, qui m'a un jour envoyé une petite vidéo d'elle sur le tournage de son film Augustine. J'ai immédiatement contacté le parc zoologique du bois d'Attilly, où elle vivait. C'est une rencontre inoubliable, une émotion tellement forte. Elle était d'une douceur incroyable. Quant à E.T., elle me manque terriblement...


L'avez-vous remplacée ?
Non. Elle restera l'unique.


Avez-vous déjà décidé d'une date à laquelle vous arrêteriez de vous produire sur scène ou d'enregistrer des disques ?
C'est, semble-t-il, une question qui taraude beaucoup les médias, mais, vous savez, il y a dix ans déjà, on me demandait : "Quand saurez-vous que ce n'est pas le combat de trop ?". Je ne me projette pas dans l'avenir. Trop angoissant. Quand le désir n'existera plus, alors je me volatiliserai.


Retranscription le 16 décembre 2012


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