Les brèves

Duel

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Mylène Farmer - Interview - Domina - Mai 1989






Domina : Mylène Farmer, l'image que vous reflétez est celle d'une libertine. Est-ce une profession de foi ?
Mylène Farmer : C'est un état. (Rires) Profession de foi, non ! Il ne faut pas trop se prendre au sérieux ! Mais c'est un plaisir, en tout cas.


Domina : Vous donnez également dans vos chansons l'image d'une ingénue.
Mylène Farmer : D'habitude on me dit perverse. Je ne sais pas si c'est compatible. Ingénue, non. Plutôt lucide. Pour moi, libertine est l'alliage de coquine et de putain.


Domina : Vous vous sentez des affinités avec les libertines du 18ème siècle ?
Mylène Farmer : Dois-je le dire ? C'est une époque qui me fascine, qui m'attire. Oui, j'aurais pu être libertine.


Domina : Vous savez qu'à l'époque, ces gens là étaient considérés comme les premiers révolutionnaires dans la mesure où ils démolissaient l'ordre établi, qu'il soit religieux ou moral. Ils se moquaient des vierges...
Mylène Farmer : C'est ce que j'aurais aimé faire aujourd'hui, mais c'est un peu difficile.


Domina : Pensez-vous qu'à notre époque la provocation érotique ait encore une fonction de perturbations sociales ?
Mylène Farmer : Bien sûr ; ce sont des choses qui certes évoluent un peu mais qui font toujours partie de l'interdit ; c'est évident.


Domina : Pensez-vous que la religion a encore une fonction importante dans notre société ?
Mylène Farmer :Personnellement, je ne lui trouve aucune fonction mais je pense que c'est une chose présente, même omniprésente.


Domina : Dans notre système actuel où l'on est entouré par l'érotisme et le sexe, que ce soit dans les films, à la télévision ou dans la pub, pensez-vous qu'il peut y avoir encore de la provocation maintenant qu'elle fait partie des choses normales et quotidiennes ?
Mylène Farmer : Je pense que oui.  Mes chansons provoquent encore des réactions. Rien n'est acquis.


Domina : Vos costumes de scène sont très originaux par rapport à ce qu'on voit actuellement ; ils sont très raffinés, coquins et très recherchés. Est-ce que vous vous habillez de cette manière provocante dans votre vie privée ?
Mylène Farmer : J'adore rester toute nue chez moi. Mais la lingerie, non, ce n'est pas quelque chose que je cultive à la maison. J'aime... mais c'est plus amusant de la présenter en public !


Domina : Quel type d'homme vous attire ?
Mylène Farmer : Je vais vous dire une banalité : les hommes intelligents.


Domina : Que faut-il faire, ou ne pas faire, pour séduire Mylène Farmer ?
Mylène Farmer : Il y a plus de choses à ne pas faire qu'à faire (rires). Certainement me séduire intellectuellement.


Domina : Il vous arrive de "flasher" sur un physique - uniquement avant que l'homme ne parle ?
Mylène Farmer : Oui, ça peut m'arriver, mais je préfère que l'homme me parle ; en fait, je n'en rencontre pas souvent, des hommes. Je suis très protégée dans ma maison. J'aime bien les hommes d'un certain âge, d'une certaine expérience. C'est vrai que j'aime bien le côté papa, le côté protecteur.


Domina : Pensez vous qu'à l'heure actuelle la sexualité féminine, qui est très mise en avant dans tous les domaines est toujours dépendante de l'homme ? Existe t-elle toujours à travers les yeux de l'homme ?
Mylène Farmer : Oui, je le pense. La femme est en représentation. C'est l'homme qui, quoi qu'il arrive, impose. Ça ne me dérange en aucun cas.


Domina : Pour revenir aux libertins du 18ème avec lesquels vous avez quelques atomes crochus, quelle a été la première lecture érotique qui vous a troublée ?
Mylène Farmer : Justine,  de Sade... et après, j'ai continué. Je l'ai lu à quinze ans.


Domina : Ça vous a vraiment troublée de façon érotique ou était-ce un phénomène de curiosité ?
Mylène Farmer : Vous êtes bien indiscrètes ! Les deux. D'autant plus que mes parents ne m'avaient jamais parlé de "ces choses là". Ce sont des choses que l'on découvre soi-même et c'est beaucoup plus drôle de les découvrir ainsi. Il faut garder certains tabous, certains interdits pour les transgresser. C'est bien, les interdits.


Domina : Dans la littérature pornographique féminine genre Xaviera Hollander ou Sylvia Bourdon, est-ce que ces femmes vous fascinent quelque part par leur attitude, par leur violence ?
Mylène Farmer : Elles ont plutôt tendance à me dégoûter.


Domina : Pourquoi ? Parce qu'elles en font trop ?
Mylène Farmer : Oui, c'est de l'illustration bâtarde et malsaine. Moi, j'aime les choses raffinées. Je trouve que Sade est très raffiné donc c'est ça que j'aime.


Domina : Pouvons-nous vous demander quel est votre meilleur souvenir érotique ?
Mylène Farmer : Ça ne va pas du tout là ! ... Euh... mon petit singe ! ; (Mylène Farmer a fait son interview avec son petit singe sur les genoux - depuis elle en a un deuxième, ndlr) Vous n’en saurez pas plus !

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