Les années Anamorphosée et Tour 1996

Le Soir, le 25/10/1995

Un film qui a été un peu la nature de ce silence car celui qui a réalisé ce long métrage est aussi mon compositeur. L’échec a été plus difficile à vivre pour Laurent que pour moi puisqu’il est l’initiateur et le créateur de Giorgino. Moi, je n’ai retenu que l’expérience agréable du tournage. Après, on se dépossède de la chose. D’autre part, j’ai toujours en moi l’idée de l’échec. L’échec de Giorgino a été désagréable évidemment, mais de là à dire que ça a ruiné ma vie : en aucun cas.

Le Soir, le 25/10/1995

Si ce nouvel album ne doit pas marcher, j’en serai attristée, c’est normal, mais je ne suis pas attachée à cela. Je dédramatise les choses, c’est assez nouveau pour moi. Si un disque ne marche pas, est-ce que ça veut vraiment dire que vous n’êtes plus aimée ou simplement que ce n’était pas le bon moment ? C’est ce que j’ai essayé de décrire dans L’Instant X, par exemple, où il y a toute cette concentration d’éléments qui font que quelque chose va ou ne va pas naître. Et puis, j’ai toujours pensé que, si je devais m’effacer, je m’effacerais. C’est de la pudeur plus qu’autre chose.

Le Soir, le 25/10/1995

Dès la sortie du film Giorgino, je suis partie aux Etats-Unis et je suis restée là-bas neuf mois. J’ai eu une coupure avec le monde d’avant. L’idée de prendre ses bagages, de n’avoir aucune racine, c’est assez nouveau pour moi. C’est la première fois, depuis les dix ans que je travaille, que j’ai ressenti ce sentiment de liberté, de vivre réellement. Vivre à Paris, ça me devenait insupportable, même si on est responsable de ça. Il arrive un moment où on s’enferme dans ses propres névroses, ses propres angoisses. Je finissais par m’enfermer et perdre quelque chose de fondamental. Le succès vous isole, donc ça s’était accentué.

Le Soir, le 25/10/1995

Etant de nature plutôt discrète, ou mystérieuse si vous préférez, je suis beaucoup moins exposée à une certaine presse. Peut-être aussi parce que j’évite de me mettre les seins nus au bord d’une piscine, mais je ne fais pas le procès des artistes qui le font, les procédés de ces journaux à paparazzi sont de toute façon détestables. Ces gens-là me poursuivent tout de même, plus facilement à Los Angeles qu’à Paris, parce qu’il y a l’exotisme.

Le Soir, le 25/10/1995

À Los Angeles, j’ai adopté un tout autre art de vivre, je me déplace. Bizarrement, je conduis là-bas, mais pas ici. J’avais besoin de tourner la page.

Le Soir, le 25/10/1995

Si on a réalisé l’album à Los Angeles, c’est uniquement parce que j’y étais déjà. Laurent m’y a rejoint.

Le Soir, le 25/10/1995

J’ai essayé d’évoquer l’écriture. La liberté de la poésie, du lecteur qui essaie de puiser plus des sensations qu’une réelle explication sur un sujet. J’ai voulu parler de l’écriture, de sa sensualité, du plaisir solitaire de l’écriture.

Le Soir, le 25/10/1995

Comme beaucoup de personnes qui l’ont lu, j’ai été beaucoup touchée par L’Alchimiste de Coelho qui traite d’un sujet merveilleux. Indépendamment, j’aime l’histoire de ce livre qui voyage dans le monde entier, c’est un objet qu’on offre en cadeau à quelqu’un. Ce voyage, également spirituel, est justement le sujet principal de ce livre.

Le Soir, le 25/10/1995

J’ai fait un travail sur moi-même. Parlant d’enfermement et de tout ça, j’ai toujours en moi cette attirance pour le néant, mais, avec le temps, je m’aperçois que ça devient stérile. C’est toujours en moi, mais, je me suis rendue compte qu’il y a des urgences qui me poussent à aller voir au-delà. Il y a aussi une timidité de ma part, mais cette timidité que je décèle chez l’autre, parfois je ne la comprends pas totalement. On peut parfois mal l’interpréter. Il y a parfois des gens qui fabriquent de fausses timidités, c’est vrai.